L’influence de l’anglais (dans les sciences)


Jusqu'au XXe siècle, les mots anglais empruntés par le français ne s’étaient jamais imposés par doses massives, bien au contraire. L'apport anglais, soulignons-le, est récent dans l'histoire du français. On peut même dire que, jusqu'au XVIIe siècle, l'influence anglaise a été insignifiante: 8 mots au XIIe siècle, 2 au XIIIe, 11 au XIVe, 6 au XVe, 14 au XVIe, puis 67 au XVIIe, 134 au XVIIIe, 377 au XIXe et... 2150 au XXe siècle. Tous les emprunts antérieurs au xviiie siècle ont été intégrés au français de telle sorte que l'on ne les perçoit plus de nos jours comme des mots anglais: est (< east), nord (< north), ouest (< west), sud (< south), paletot (< paltok), rade (< rad), contredanse (< country-dance), pingouin (< pinguyn), paquebot (< packet-boat), comité (< committee), boulingrin (< bowling-green), interlope (< interloper), rosbif (< roast-beef), etc. Dès le milieu du XXe siècle, les États-Unis ont relayé la Grande-Bretagne et ont inondé de leurs mots le cinéma, les produits industriels, le commerce, le sport, l'industrie pétrolière, l'informatique et à peu près tout le vaste domaine des sciences et de la technologie américaine. En effet, l'histoire contemporaine peut témoigner que les emprunts anglais sont maintenant entrés dans la langue.  
En 1965, le linguiste français Pierre Guiraud dénombrait 700 mots anglais passés au français depuis la fin de la Première Guerre mondiale. Outre le fait que le calcul restait sûrement en deça de la réalité, le nombre des emprunts à l'anglais s'est multiplié depuis ce temps – au moins 2500. Toutefois, à la différence de l'influence italienne qui a subi l'épreuve du temps, l'influence anglo-américaine est encore trop récente pour que nous puissions évaluer ce qu'il en restera dans cinquante ou cent ans. Comme on le sait, la plupart des emprunts transmis à une époque donnée sont appelés à disparaître dans les décennies qui suivent leur adoption. Quoi qu'il en soit, il est certain que l'influence de la langue anglaise restera très marquante dans l'histoire du français – comme celle du français sur l’anglais – et de plusieurs autres langues.